Le Code de Procédure Civile édicte des règles de forme strictes pour les attestations versées aux débats. Leur recevabilité suppose qu'elles soient établies de manière manuscrite, qu'elles soient accompagnées d'une pièce d'identité de leur auteur, et qu'elles comportent des mentions obligatoires.
Parmi ces mentions, figurent celles permettant d'identifier de manière certaine l'attestant(e), ce qui ne permet normalement pas le production en justice de "témoignage anonyme".
Cette faculté est pourtant prévue dans d'autres domaines, notamment en droit pénal, lorsque la victime a peur de représailles.
Or, dans certains cas, les mêmes difficultés se présentent en droit social.
Pour des raisons personnelles, professionnelles, syndicales, ou par crainte, des témoins peuvent conditionner leur témoignage au fait qu'il soit anonymisé.
C'est également le cas en matière de harcèlement moral ou sexuel, la Cour de Cassation imposant à la fois à l'employeur de diligenter une enquête interne et de préserver les "droits" des différents protagonistes et leurs identités, ce qui impose aux employeurs d'anonymiser certains des éléments de leur enquête interne.
L'arrêt rendu le 14 avril 2023 par la Cour de Cassation est intéressant puisque la Cour a retenu que :
" Si le juge ne peut pas fonder sa décision uniquement ou de manière déterminante sur des témoignages anonymes, il peut néanmoins prendre en considération des témoignages anonymisés, c'est-à-dire rendus anonymes a posteriori afin de protéger leurs auteurs mais dont l'identité est néanmoins connue par l'employeur, lorsque ceux-ci sont corroborés par d'autres éléments permettant d'en analyser la crédibilité et la pertinence" (Cass. soc. 19-4-2023 n° 21-20.308 F-B).
Cette décision a vocation à s'appliquer dans la plupart des situations précitées, et offre à l'employeur la possibilité de recueillir, de produire et d'utiliser pour sa défense des éléments (comptes-rendus d'entretiens, mails, lettres..) qui lui permettront de confirmer le contenu d'une ou plusieurs attestations ou auditions (dans le cadre d'une enquête interne) "anonymisées" a posteriori.
Nous sommes ravis de constater que la Cour de Cassation valide ainsi une pratique que nous avions dégagée dans l'intérêt de nos clients depuis de nombreuses années.
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